Les élèves de l’école d’art dramatique du Théâtre National de Strasbourg habitent ce théâtre depuis trois semaines, le gouvernement ne nous entend toujours pas. Aujourd’hui, nous avons décidé de passer à une occupation en ouvrant les portes de notre théâtre aux étudiant.e.s, précaires, travailleurs et travailleuses de tous les secteurs.
Communiqué de presse
Aujourd’hui 30 mars 2021, 95 lieux de culture sont occupés en France.
À Strasbourg, nous occupons ce théâtre pour faire entendre nos cris. Nous occupons pour refuser, activement, la division sociale que nous imposent ces termes, essentiel / non essentiels. Nous occupons pour demander la reconnaissance absolue du droit à l’existence, au travail, et à la dignité de tous les travailleurs et travailleuses de tous les secteurs. Nous occupons pour réactiver la pensée de moins en moins vivante, la partager, débattre lors de nos forums et de nos assemblées générales avec les Strasbourgeois. Nous occupons pour rester actifs dans ce monde ou le lien social est de plus en plus empêché, où les possibilités de pensées sont réduites.
Nous, étudiant-e s, allons faire notre entrée dans un monde professionnel sinistré, profondément fragilisé par la crise, embouteillé, miné par une concurrence accrue. Nous avons besoin de bien plus qu’un accompagnement, nous avons besoin d’une réelle prise en compte de notre situation : une aide à l’emploi pérenne, un dispositif spécifique, financier mais aussi artistique de commandes faites aux artistes des générations impactées par la crise.
Des pans entiers de notre société ont basculé dans l’urgence sociale. Les étudiants laissés à leur détresse économique, les deux millions d’intermittent-e-s de l’emploi, saisonniers, intérimaires, extras, guides conférencier.e.s, maitres d’hôtel, condamnés à une mort sociale par le gouvernement. Prenez-les en compte. Prenez-nous tous en compte. Nous ne diminuons en rien la gravité de la pandémie. Nous nous sommes adaptés aux contraintes sanitaires, nous portons nos masques, nous respectons la distanciation, nous mettons du gel à disposition, nous ventilons, nous demandons un test PCR de moins de 24h aux nouveaux et nouvelles arrivant.e.s et nous faisons des tests PCR chaque semaine. Nous nous adaptons, nous nous adapterons encore. Nous sommes prêt-e-s.
Notre lutte se veut multiple et globale ; la situation délétère que subit en ce moment le monde de la culture ne se cantonne pas seulement à ce secteur mais impacte toutes les strates de la société. C’est pourquoi nous avons souhaité accueillir plus de monde dans nos lieux, des personnes différentes, jeunes, moins jeunes, de différents milieux sociaux et professionnels. Nous appelons à la mobilisation pour que les conséquences de la crise sanitaire ne soient pas irréversibles et que le gouvernement prenne ses responsabilités vis-à-vis des plus démunis et des générations à venir.
Nous demandons :
- LA PROLONGATION DE L’ANNÉE BLANCHE et son extension aux travailleur.e.s
- LE RETRAIT DE LA RÉFORME DE L’ASSURANCE CHOMÂGE et des mesures spécifiques de soutien pour tout.e.s les intermittent.e.s de l’emploi et travailleur.e.s, précaires (extras saisoniers, intermieres…) condamnés à une mort sociale et bientôt physique par le gouvernement.
- UNE ANNÉE « GRISE » POUR LA JEUNESSE : les jeunes diplômés vont faire leur entrée dans un marché de l’emploi sans débouchés, saturé par les reports : il sera non seulement très difficile d’atteindre le seuil d’heures nécessaires pour l’obtention de l’intermittence, mais quasi impossible, pendant la première année, de survivre avec les seuls cachets. Nous demandons une « année grise » pour les primo-entrants qui verra, pour la première année, les conditions d’accès à l’intermittence allégées. Pour que les conditions d’accès à l’emploi soient rendues plus équitables, nous proposons l’élargissement du système du « Jeune Théâtre National », une facilitation l’embauche qui ne profite pour l’instant qu’aux diplômés du TNS et du CNSAD.
- REPRÉSENTATION, PARTICIPATION, DIALOGUE DANS NOS INSTITUTIONS GOUVERNANTES (exemple : plus de délégués au CNESERAC, participer à l’élaboration des modalités de distribution des subventions de relance et des suivantes, à la DRAC par exemple). Transparence et visibilité des organes du Ministère de la Culture auprès de ses usagers.
- LE RETRAIT ABSOLU DES TERMES “ESSENTIEL”/ “NON ESSENTIEL”
- DES MOYENS D’EXISTENCE ÉQUITABLES POUR LA JEUNE CRÉATION : Quota de jeunes dans la programmation des CDN et les scènes nationales et conventionnées. Dispositifs de création et de recherche sans obligation de résultats, commandes faites aux jeunes créateur-trice-s.
- Enfin, et seulement quand les autres mesures auront été mises en place : UN CALENDRIER DE RÉOUVERTURE POUR LES LIEUX CULTURELS DANS LE RESPECT DES CONSIGNES SANITAIRES ET LA MISE EN PLACE D’UN DISPOSITIF DE SOUTIEN POUR ACCOMPAGNER LA RÉOUVERTURE